Une étude montre l’implication de l’UE dans le commerce mondial des requins
Résumé :
La surpêche joue un rôle important dans le déclin des requins motivé par la forte demande internationale d’ailerons et de viande représentée par les marchés asiatiques. Cette étude par l’IFAW, a été réalisée sur des données commerciales officielles d’importation, de réexportation et d’exportation d’ailerons et de viande de 2003 à 2020. Les résultats montrent que l’UE est une source d’importation importante responsable de 28% entre 2003 et 2020, jusqu’à 45% en 2020 des produits liés aux ailerons de requin. L’Espagne étant le premier pays exportateur (51 795 t) suivi du Portugal (642 t). La comparaison des données montre des chiffres d’importations asiatiques systématiquement plus élevés que ceux de l’exportation de l’UE : décalage allant de 1 650 t à 2 318 t. L’UE est donc un acteur clé de ce commerce, lui donnant une responsabilité quant à l’importance de la transparence de ses déclarations.
Pour en savoir plus sur l’étude
L’ étude réalisée par l’IFAW (The International Fund for Animal Welfare) en 2022, a permis de mettre en avant le rôle important de l’Union européenne dans le commerce mondial des requins. Ici, nous reprenons les chiffres clés de l’étude afin de permettre de mieux comprendre leurs résultats.
Le déclin des populations de requins à l’échelle mondiale est motivé par la demande internationale d’ailerons et de viande de requin, associée à un manque généralisé de gestion des captures et du commerce des espèces de requins.
La demande d’ailerons de requin est principalement représentée par les marchés asiatiques tels que Hong Kong, Singapour et la Chine continentale (50% de ce commerce mondial passe par la RAS de Hong Kong, Singapour et la province de Taïwan) mais l’envergure du commerce est mondiale. En effet, plus de 128 pays/territoires à travers le monde alimentent ce marché.
Les États membres de l’UE fournissent en moyenne 28 % des importations liées aux ailerons de requin dans la RAS de Hong Kong, Singapour et la province de Taïwan, allant même jusqu’à 45% en 2020 et représente 22 % de l’approvisionnement mondial en viande de requin (Niedermüller et al., 2021).
La méthode de l’enquête
L’étude de l’IFAW couvre à la fois les données d’importation, de réexportation et d’exportation d’ailerons (congelés, séchés ou frais) et de viande compilée sur une longue période (2003-2020).
Cette étude utilise les données commerciales officielles des principaux acteurs du commerce mondial des ailerons et de la viande de requin pour tracer les routes commerciales et effectuer des comparaisons croisées à l’aide des codes de marchandises (ailerons et viande) du Système harmonisé (SH), collectés auprès de trois centres commerciaux clés dans le commerce international des ailerons de requin, incluant Hong Kong, la province de Taïwan et Singapour.
Les résultats trouvés
- Divergences de données : comparaison des données, entre les importations des hubs asiatiques et les exportations de l’UE
La tendance générale correspond, mais les chiffres d’importation sont systématiquement plus élevés que ceux de l’exportation de l’UE : le décalage va de 1 650 t à 2 318 t. Cela est préoccupant puisqu’il s’agit de potentielle déclaration erronée dans le commerce des ailerons de requin de la part de l’UE.
NB : pour les ailerons congelés : le poids de l’eau peut expliquer une partie de cette différence.
→ Après 2018, les données d’exportation coïncident pour les ailerons secs ou frais (Suggérant l’exportation directe vers Hong Kong, la province de Taïwan et Singapour)
- Importations liées aux ailerons de requin en provenance de l’UE et exportations vers l’UE
Tableau 1. Classement des pays membres de l’UE sources pour les importations d’ailerons (Shea and al., 2022) | Tableau 2. Classement des principales destinations dans les Etats membres de l’UE du total des exportations des ailerons. (Shea and al., 2022) |
L’UE est une source importante (28% entre 2003 et 2020), et parfois la plus importante (45% en 2020) de produits liés au requin pour les plaques tournantes que sont Hong Kong, Singapour et la province de Taïwan : de toutes les sources, un total de 188 368 t (tonnes métriques) de produits d’ailerons de requin, avec l’Espagne en premier pays exportateur (51795 t) suivi du Portugal (642 t) ont été trouvé (tableau 1).
Concernant les exportations, et réexportations totales, elles étaient destinées à des destinations hors UE : Seulement 0,02 % (environ un total de 24,99 t), avec l’Espagne en premier exportateur vers l’UE (20.93 t) suivi des Pays Bas (3.38 t) sont responsables de ce commerce. : Soulignant le fait que l’UE est donc fournisseur, mais pas nécessairement consommateur de produits liés aux ailerons de requin
- Importations liées à la viande de requin en provenance de l’UE
L’étude a montré que l’UE était autrefois une source importante de viande de requin pour ces trois sites, mais cela a changé ces dernières années : un total de 3 981 t de viande aurait été importées des États membres de l’UE, L’Espagne était responsable d’un total de 3 929,95 t.→ Soit environ 4 % du total des importations déclarées au cours de la période étudiée, en majorité entre 2008 et 2011. Après 2011, elles ont chuté, et depuis 2016 il n’y a eu aucune autre importation déclarée.
À la lumière de la récente étude identifiant l’UE comme fournisseur de 22 % de la viande de requin dans le monde (Niedermüller et al., 2021), il est probable que la baisse des importations de viande en provenance de l’UE soit liée à des changements dans les routes commerciales. Notamment car Hong Kong, Singapour et la province de Taïwan ne sont pas les plus gros consommateurs de viande de requin, ce sont davantage l’Amérique et la Corée du Sud.
- Liste des destinations d’exportations mondiales et de l’UE liées à la viande de requin.
Tableau 3. Classement des destinations mondiale d’exportation de viande de requin hors Hong Kong, Singapour et Taïwan (Shea and al., 2022) | Tableau 4. Classement des destinations d’exportations des pays membres de l’UE liées à la viande de requin (Shea and al., 2022) |
La proportion d’exportations et réexportations de ces destinations vers l’UE étaient relativement faibles : total de 6 688,85 t comparé à l’exportation mondiale qui est d’environ de plus de 200 000t. Surtout en prenant en considération que depuis 2017, il n’y a plus d’exportations vers l’Italie.
Les recommandations
De cette étude, l’UE représente un acteur clé du marché ce qui entraîne une responsabilité importante pour garantir l’exactitude des registres commerciaux et la transparence.
Pour améliorer la traçabilité des ailerons ou de la viande de requin, au vu de leurs résultats, l’étude propose différentes recommandations :
- Améliorer l’enregistrement des données et registres commerciaux via un examen du Système harmonisé (SH) des codes marchandises pour les produits de requin et dérivés et standardiser les codes utilisés avec des partenaires commerciaux clés
- S’assurer que toutes les espèces de requins présentes dans le commerce soient inscrites à la l’annexe II de la CITES
- Renforcer les capacités nationales pour le suivi commercial à long terme, grâce à l’analyse des données commerciales
- Prioriser l’utilisation des données commerciales pour lutter contre le commerce illégal d’espèces sauvages de requins et ses produits dérivés
Pour en savoir plus :
Shea, S., Slee, B., O’Toole, M. (2022) Supply and Demand: the EU’s role in the global shark trade. Stichting IFAW (International Fund for Animal Welfare), The Hague, The Netherlands. 36pp.